Steven Cohen excelle dans l’art de porter la violence du monde avec humilité, de la regarder droit dans les yeux du haut de sa propre fragilité. Toujours perché sur talons hauts et le corps pailleté, le performeur sud-africain, reçu pour la première fois à Clermont-Ferrand, nous invite dans l’intimité de son boudoir lardé des cicatrices de l’Histoire.

Des tableaux, des candélabres, des guéridons ou encore des animaux naturalisés : Steven Cohen nous ouvre son boudoir – une pièce à l’origine réservée aux femmes pour de multiples usages, lieu d’étude, de politique, de science, de pratique des arts, de rencontres, de complots… – à l’écart de la sphère civile des hommes. Tout aussi baroque que son intérieur, le performeur sud-africain, perché sur des talons interminables en forme de globes et flanqué d’ailes de papillon, nous guide dans les secrets de son cocon, visuel, lumineux, olfactif. Entre un mobilier hérité de l’époque coloniale et une étoile jaune, les bruits de l’extérieur nous parviennent par images projetées : un atelier de tannerie en Afrique du Sud ou un camp de concentration alsacien. Pour l’artiste au corps ornementé, métamorphosé et exposé, le privé est une affaire publique, et l’intime la matrice de nos possibles actions politiques. Du haut de sa silhouette fragile et sublimée, il nous aide à trouver un équilibre, même précaire, dans ce qui fait « l’humanité » et ses extrêmes paradoxes.